Highly Cited Researchers 2024
Publié le 04/12/2024
Le groupe Pérovskite rennais mêlant membres des deux unités mixtes de recherche CNRS Institut FOTON et Institut des Sciences Chimiques de Rennes (ISCR, équipe CTI Université de Rennes). Claudine Katan et Jacky Even au centre de la photo.
Cette année encore, Jacky Even, enseignant-chercheur de renom à l’INSA Rennes, figure parmi les Highly Cited Researchers, un classement prestigieux qui recense les scientifiques dont les travaux ont un impact majeur à l’échelle internationale. Il partage cette année cette distinction avec Claudine Katan, chercheuse à l'ISCR, marquant ainsi l’excellence de leur collaboration dans le domaine des matériaux et des nanotechnologies. À travers cet entretien, ils reviennent sur les clés de leur succès, l’importance des collaborations internationales et les défis scientifiques qui façonneront leur domaine dans les années à venir.
Comment collaborez-vous ensemble dans vos projets ? Y a-t-il une complémentarité spécifique entre vos approches scientifiques ?
Claudine Katan - "Avec Jacky, nous animons une équipe transverse à nos deux laboratoires depuis plus de dix ans, elle regroupe actuellement une dizaine de collaborateurs. Elle n’a pas d’existence institutionnelle mais nos directeurs et chefs d’équipe nous permettent de mutualiser nos financements et les moyens humains. Pour ce qui est des approches scientifiques, elles sont clairement complémentaires avec des compétences plus marquées sur le volet dispositif et les méthodes empiriques à l’institut FOTON et une expertise à l’interface de la chimie-physique, incluant l’organique, et les méthodes quantiques avancées du côté de l’ISCR. Cela dit, je pense que l’une des clés de la réussite vient du fait que nous avons une formation initiale très similaire, ce qui nous donne un langage commun."
Quelle est l’importance des collaborations internationales dans vos travaux ?
Jacky Even - "Les collaborations internationales sont primordiales pour un sujet aussi compétitif et pour lequel les avancées fondamentales et les débouchés applicatifs mêlant laboratoires académiques et désormais industriels du photovoltaïque sont très rapides. Nous avons basé le choix de nos partenaires aux USA mais aussi en Europe à travers des projets H2020 sur des critères d’excellence et de pertinence scientifique. Cela nous a donné un accès direct aux derniers développements au niveau des matériaux (nouvelles structures pérovskites, phases 2D multicouches, nanostructures quantiques, etc.), des techniques instrumentales (notamment accès aux très grandes infrastructures de recherche (synchrotron, réacteurs de neutrons, diffraction femtoseconde, etc.) et des dispositifs pérovskites (cellules solaires à l’état de l’art, cellules photoélectriques, LED, émetteurs quantiques, dispositifs de production d’hydrogène, etc.). Dans ce contexte très enrichissant au niveau scientifique, nous participons activement à l’élaboration de dispositifs pertinents pour faire face aux grands enjeux scientifiques et environnementaux actuels."
Quels sont, selon vous, les facteurs clés qui ont permis à vos travaux d’avoir un tel impact dans la communauté scientifique ?
Claudine Katan - "Le hasard côté calendrier, puisque nous avions un petit projet sur les pérovskites avant qu’elles ne fassent leur 1re percée dans le photovoltaïque, l’excellente connaissance des semiconducteurs conventionnels qu’avait Jacky allié à mon background en physique du solide. En fait, ayant été d’abord exploitée dans le contexte de cellules à colorant, les pérovskites halogénées étaient appréhendées sous cet angle et nous avons très tôt proposé un changement de paradigme en les plaçant comme une nouvelle classe de semiconducteurs que nous nous sommes attachés à caractériser. Nous devons également notre impact à quelques rencontres déterminantes sans lesquels nous aurions été littéralement spoliés. Je pense notamment à notre collègue Filippo De Angelis qui n’hésitait pas interrompre des conférenciers pour rappeler clairement que nous avions démontré avant tout le monde l’importance prépondérante du couplage spin-orbite dans ces matériaux, ou encore à Henry Snaith pour nos travaux pionniers sur l’écrantage de l’exciton dans les pérovskites tri-dimensionnelles, indication claire qu’il fallait changer de paradigme au niveau fondamental."
Quels sont, selon vous, les grands défis scientifiques de votre domaine dans les prochaines années ?
Jacky Even - "Nous entrons désormais dans l’ère des dispositifs pérovskites multicouches initiée à travers nos articles copubliés dans Science en 2022 et 2024. Au niveau fondamental la prise en compte réelle de l’anharmonicité du réseau cristallin et de son influence sur les propriétés optoélectroniques, les propriétés de spins et l’émission quantique des matériaux et nanostructures pérovskites ouvre un vaste champ d’exploration qui n’a été abordé que très peu dans le cadre des semiconducteurs classiques."
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